Le terme budô (武道) est le terme général utilisé au Japon pour désigner le jûdô, le kendô, le karatedô, l’aikidô, le sumô, le naginata, le kyûdô, le shôrinji kenpô, et le jûkendô. Ce terme imbrique plusieurs notions aux sens proches : « techniques martiales systématisées au Japon », « tradition du bushidô », « formation du caractère », « sens moral » et « bonnes manières ». Ces différents aspects impliquent des assignations à des rapports de classe et de genre qui se retrouvent au moins pour certaines en filigrane dans la totalité des pratiques sportives, au Japon et ailleurs. Mais le lieu politique considéré, le Japon contemporain, et la construction idéologique de « la tradition du bushidô » qui le traverse, rajoutent aux rapports de genre qui se jouent dans les budôs des contraintes absentes des sports contemporains.
Budôs et genre
Les questions de genre sont imbriquées dans les représentations, les pratiques et la règlementation des disciplines sportives. Dans la plupart des sociétés, les femmes ont pu progressivement pratiquer des sports puis participer à la compétition dans des disciplines toujours plus nombreuses malgré les nombreux questionnements et résistances qui se font toujours entendre. Au sein des fédérations de budô également, les catégories masculines et féminines demeurent largement distinctes. Pour la plupart des disciplines, ces catégories ne se recoupent pas et correspondent à des systèmes de représentations et financements différenciés.
Au Japon, les budôs posent la question de l’acceptation et de la position des femmes dans ces pratiques guerrières ou violentes devenues sports et activités physiques pacifiées et euphémisées, mais qui continuent à s’inscrire dans un système hiérarchique stricte où le « corps maternel » a vocation à être protégé. Est-ce que, comme on le voit dans les Forces d’autodéfense où les femmes sont désormais acceptées en position de combattantes, les budôs peuvent aussi offrir aux femmes une relative autonomie même subordonnée à leurs masculinités spécifiques ? Est-ce que les budôs sont des espaces de légitimation des violences, physiques et symboliques, dont les femmes seraient une catégorie de victimes ? En France, les arts martiaux sont plus pratiqués en tant que systèmes d’autodéfense ou d’amélioration de soi et ne font référence aux caractéristiques « morales » des budôs que pour renforcer un aspect exotique accrocheur. Si les rapports de genre au Japon et en France sont très différents, qu’en est-il de ces lieux à l’intersection des deux cultures ?
Nous souhaitons pour cette journée d’étude aborder les rapports de genre au sein du cadre spécifique des budôs au Japon et de leur transposition en « arts martiaux » en France, car ces pratiques japonaises s’y sont installées et acculturées. Nous invitons des chercheur·es, ainsi que des pratiquant·es ou des professionnel·les des pratiques sportives à présenter des contributions pluridisciplinaires qui aborderont les questions de genre suivantes : les cadres juridiques, politiques, institutionnels, scolaires de la pratique des budôs ainsi que leurs différences et leur évolution, la féminisation de ces pratiques, leurs rapports de genre intrinsèques, la représentation des corps, les violences sexistes, etc.
Les communications d’une durée de 20 minutes seront données en français, mais des communications en anglais ou japonais peuvent être acceptées. Les propositions de jeunes chercheur·es sont particulièrement encouragées.