Portrait : Yann Borjon-Privé, nouveau membre du bureau des Jeunes chercheur·e·s du GIS Asie

Docteur associé au laboratoire Groupe Sociétés Religions Laïcité (GSRL, UMR 8582 CNRS EPHE PSL), Yann Borjon-Privé a rejoint le Bureau des Jeunes chercheur·e·s du GIS Asie début juillet 2023.

Ses travaux portent sur la mémoire et la violence en lien à l’identité et à la religion. Il est l’auteur d’une thèse intitulée Étude de la construction d'un passé dolgane et dynamiques identitaires contemporaines dans l'Arctique russe : approche historique et anthropologique, dirigée par Vincent Goossaert et co-encadrée par Jean-Luc Lambert. En analysant les conceptions administratives, scientifiques et populaires du groupe ethnique des Dolganes en tant que nation, société ou peuple de l’Arctique russe (Sibérie du nord) des années 1920 à 2020, il a montré comment les autorités russes et soviétiques ont modifié ce groupe ethnique. La focale portait notamment sur la période 1930-1970, pendant laquelle les Bolchéviques ont retiré l’ethnonyme dolgane de la liste officielle des nationalités, avant qu’il n’y soit rétabli sous l’impulsion d’ethnographes proches du terrain. Les élites locales ont greffé une patrimonialisation sur cette reconnaissance. Elles l’ont nourri à l’aide des “pages blanches” de l’histoire dolgane, selon des formes et des contenus autorisés dans l’éthique soviétique.Ses recherches post-doctorales interrogent le système religieux dolgane, ses dynamiques d’hier et d’aujourd’hui et le rôle que la violence y joue. Il analyse notamment des récits qu’il a notés sur le terrain et qu’il compare à d’autres récits recueillis depuis le XVIIIe siècle. Ces textes oraux restituent des relations intergroupes liées aux “pages grises ou noires” de l’histoire nord-sibérienne avec des épisodes oubliés ou tus. Ils mettent aussi en scène des chamanes, spécialistes rituels, tantôt dans le soin, tantôt dans l’aide économique. Or les chamanes dolganes ont été violemment réprimés dans les années 1930 et humiliés par la suite. La pratique de leur spécialité a disparu vers 1970 sans qu’elle ne soit réactivée de façon pérenne. C’est une particularité par rapport à des néo-chamanismes observés ailleurs en Sibérie après 1990. Devant ce constat, Yann Borjon-Privé a fondé son ethnographie autour de la violence et de la mémoire du chamanisme en coopérant depuis 2009 avec de derniers témoins et connaisseurs de ces pratiques rituelles. Il compare leurs discours et les représentations avec les pratiques qu’il a observées ou celles que des archives et des ethnographies anciennes décrivent.
 

Il a déjà été membre du Bureau des jeunes chercheurs en 2018-2019.

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Yann Borjon-Privé